Acte I
Scène 1
Décor nu. Seul un canapé en mauvais état occupe le milieu de la scène, face aux spectateurs. Alex et Juliette, assis dans le canapé, s’embrassent. Baiser qui va devenir de plus en plus torride, jusqu’à ce que, emportés par leur élan, ils tombent derrière le canapé. Choc. Râle de Juliette. Au début du dialogue, les comédiens restent cachés derrière le canapé.
Juliette
Tu pourrais faire attention !
Alex
Je suis désolé.
Juliette
Qu’est-ce que tu peux être maladroit !
Alex
Excuse-moi.
Juliette
Une catastrophe ambulante !
Alex
Bon, ça va, tu vas t’en remettre…
Juliette
En plus, tu embrasses mal !
Alex, en sortant la tête de derrière le canapé.
Quoi ?
Juliette, se relève en évitant le regard d’Alex.
Non, rien…
Alex
Comment ça, rien ? Tu as dit que j’embrassais mal.
Juliette
Mais non…
Alex
Tu n’as qu’à dire que j’entends mal, aussi !
Juliette
C’est possible. Tu prends de l’âge, mon chéri.
Alex
Moque-toi de moi, en plus ! Donc, j’embrasse mal ?
Juliette, s’assoit dans le canapé.
Oh ! j’ai dit ça comme ça… C’est rien. Oublie.
Alex, s’assoit, vexé.
Tu as raison, ce n’est rien. J’ai déjà oublié. (Un temps.) En tout cas, merci pour le compliment. C’était mon cadeau d’anniversaire ?
Juliette
Ça n’a rien à voir avec ton anniversaire, c’est sorti comme ça. (Elle réfléchit, puis se tourne vers Alex.) C’est ton anniversaire ?
Alex
Non.
Juliette, soulagée.
Ah bon…
Alex, glacial.
Mon anniversaire, c’était hier.
Juliette
Ah oui ! C’est vrai ! (Très affectueuse, elle enlace Alex qui reste rigide.) Oh ! mon chéri, je te demande pardon ! Avec tout ce boulot ces dernières semaines, je ne sais même plus quel jour on est.
Alex, toujours rigide.
Ce n’est pas grave.
Juliette, en lui faisant des mamours pour le dérider.
Alex… Mon chaton… Allez, ne fais pas la tête… Fais-moi un sourire… S’il te plaît…
Alex, glacial.
Tout va bien, je ne fais pas la tête.
Juliette souffle et reprend place à l’autre bout du canapé. Elle regarde Alex qui reste toujours aussi fermé, les yeux dans le vague.
Juliette, sèche.
De toute façon, tu as horreur des fêtes. Tu n’as jamais voulu que je t’offre des cadeaux. Alors depuis le temps, ça m’a coupé mes élans, voilà.
Alex
Je t’ai souvent dit que j’avais horreur des critiques injustes, mais là, par contre, ça ne t’a jamais coupé tes élans.
Juliette
Je ne te critique pas.
Alex
Ah bon ? J’avais cru entendre quelqu’un dans la pièce dire que j’embrassais mal.
Juliette
Ah… ça ?
Alex
En même temps, tu as raison de te plaindre. Désolé de ne pas être à la hauteur. Si madame n’est pas satisfaite…
Juliette
J’étais sûre que tu te vexerais. On ne peut rien te dire, de toute façon.
Alex
Bon, sans me vexer, je résume : non seulement c’est ma faute si tu as oublié mon anniversaire, mais en plus je suis susceptible et nul au lit. Autre chose ? C’est le moment, je me sens réceptif, là.
Juliette
Je n’ai jamais dit que tu étais nul au lit.
Alex
Ah ! c’est plutôt une bonne nouvelle ! Donc je suis juste nul pour embrasser, mais pour le reste ça va, tu es contente au lit. C’est ça ? (Juliette ne répond pas. Elle reste sur le canapé à regarder ses chaussures.) Juliette ? C’est ça ? (Un temps.) C’est pas ça ?
La voix de Bernard, metteur en scène de la pièce que Juliette et Alex sont en train de répéter, retentit des coulisses.
Voix de Bernard
Non, c’est pas ça ! (Juliette et Alex se lèvent du canapé et regardent dans la direction des coulisses.) C’est pas bon, les enfants. Il faut tout reprendre.
Scène 2
Bernard arrive sur scène.
Juliette
Qu’est-ce qui ne va pas, Bernard ?
Bernard
Je ne sais pas… Il y a quelque chose qui cloche. Ça ne fonctionne pas.
Alex
C’est toi le metteur en scène.
Juliette
On a suivi tes indications.
Bernard, arpente la scène.
Je sais, je sais… Mais il manque quelque chose… Vous comprenez, je veux que les spectateurs se mettent à la place de vos personnages. Que tous les hommes dans la salle se posent cette question au même moment : « Est-ce que j’embrasse bien ? Est-ce que ma femme oserait me le dire si ce n’était pas le cas ? »
Juliette
Ah oui ! C’est génial !
Bernard, en continuant à tourner en rond.
Les gens viennent souvent en couple au théâtre. Ils sont là, assis côte à côte pendant une heure et demie, sans se parler. Je veux qu’ils gambergent chacun de leur côté, qu’ils s’interrogent. Qu’ils se demandent ce que l’autre a dans la tête à cet instant précis. Qu’ils se posent la question : est-ce que mon conjoint est vraiment satisfait sexuellement parlant ?
Juliette
Génial.
Bernard
Que ça trotte dans leur tête, vous voyez ? Et qu’ils aient une heure et demie pour se demander s’ils vont en parler ou pas entre eux à la sortie du théâtre. Créer un malaise dans le public pour obliger les couples à se remettre en cause.
Juliette
Génial.
Alex, bas, à Juliette, pendant que Bernard continue
les cent pas, occupé par ses pensées.
Tu arrêtes un peu avec ton « génial » ?
Juliette, bas, à Alex.
Jaloux !
Alex, bas, à Juliette.
Tu es ridicule. (Il l’imite.) « Génial ! »
Elle lui file un coup de pied, il la pousse, elle lui colle une gifle : pantomime burlesque très rapide. Bernard continue de tourner en rond et ne voit rien.
Bernard
Bon, les enfants, je vais voir si je trouve des accessoires, quelque chose pour animer la scène. De votre côté, réfléchissez à la situation, apportez des idées. (Il sort.)
Scène 3
Juliette va s’asseoir sur le canapé. Alex la rejoint. Ils regardent ailleurs.
Alex
« Créer un malaise dans le public », « Obliger les couples à se remettre en cause ». Qu’est-ce qui lui prend à Bernard ? Depuis quand on se pose des questions pareilles quand on monte une pièce de boulevard ?
Juliette
Ça ne fait pas de mal de se poser des questions, parfois. Tu devrais essayer.
Alex
Vingt ans qu’il fait rire les salles avec des couples infidèles, des quiproquos et des claquements de portes. Je ne l’ai jamais entendu se poser une seule question.
Juliette
Il y a des gens qui évoluent dans la vie. Ça aussi, tu devrais essayer.
Alex
Tu ne serais pas en train de me chercher, par hasard ?
Juliette
Pas du tout. Ne commence pas avec ta paranoïa.
Alex
Et là, tu ne me cherches pas ? (Juliette a le regard dans le vide. Alex la fixe en attendant qu’elle réponde.) Hé ! ho ! Qu’est-ce qui t’arrive ?
Juliette
Rien. Je réfléchis.
Alex
Une fois de temps en temps, ça ne peut pas te faire de mal.
Juliette
Très drôle.
Alex
Légitime défense, tu as commencé. Tu réfléchis à quoi ?
Juliette
À ce qu’a écrit Bernard. Son truc sur les couples. Nous deux, ça fait combien de temps ?
Alex
Neuf ans, trois mois, onze jours et six heures.
Juliette, en se retournant vers Alex, surprise.
Tu tiens les comptes ?
Alex
Pas du tout, j’ai dit n’importe quoi pour que tu te retournes. J’en avais assez de voir ta nuque.
Juliette lève les yeux au ciel et souffle.
Juliette
N’empêche qu’il a raison… On ne se pose pas toujours les bonnes questions dans un couple.
Alex
À quel propos ?
Juliette
Par exemple sur notre façon d’embrasser.
Alex
Il y a une question à se poser sur notre façon d’embrasser ?
Juliette
Ben… Non… Oublie.
Alex
Mais si, tu allais dire quelque chose. Vas-y, lâche-toi.
Juliette
Non… Tu vas te vexer.
Alex
Qu’est-ce que tu nous fais, là ? Tu as repris ton rôle ? Tu essaies une nouvelle façon de jouer la scène ?
Juliette
Oui. Voilà. C’est ça.
Long silence. Juliette va regarder du côté des coulisses si Bernard arrive.
Alex
Tu trouves que j’embrasse mal ? En vrai ? Et tu découvres ça au bout de neuf ans ?
Juliette
Neuf ans, trois mois, onze jours et six heures.
Alex
Très drôle. On peut savoir pourquoi ça te prend aujourd’hui ?
Juliette
C’est le rôle qui m’y a fait penser. Je n’y avais pas réfléchi avant.
Alex
On n’a pas besoin de « réfléchir » à notre façon d’embrasser !
Juliette
Si tu le dis… C’est peut-être pour ça que tu… (Elle s’interrompt.)
Alex
Que j’embrasse mal ? C’est ça ? Dis-le, ne te gêne pas pour moi ! De toute façon, qu’est-ce que ça signifie : « Tu embrasses mal » ? Par rapport à quoi, d’abord ? (Il se moque.) Madame a embrassé quelqu’un d’autre récemment pour comparer ? (Juliette ne répond pas, regard fuyant. Alex attend, son sourire moqueur disparaît.) Juliette ? (Elle ne dit toujours rien.) Hé ! ho ! (Long silence. Inquiet, il se lève.) Juliette, regarde-moi ! Est-ce que tu as embrassé quelqu’un…
Alex est interrompu par la voix de Bernard provenant des coulisses.
Voix de Bernard
Mais bien sûr qu’elle l’a fait !
Alex et Juliette se tournent vers Bernard qui arrive. Il parle au téléphone.
Scène 4
Bernard
Mais oui, je te dis, elle l’a fait ! Allez, à bientôt. (Il raccroche. À Juliette et Alex.) Les enfants, j’ai encore eu une idée brillante.
Juliette
Génial !
Bernard
Parfois, je m’épate moi-même.
Juliette
Tu es le meilleur, Bernard.
Bernard
Merci, ma belle.
Bernard et Juliette se regardent, tout proches, l’air très contents tous les deux. Alex, consterné, les regarde alternativement comme s’il soupçonnait une idylle entre eux.
Alex
Je croyais que tu devais rapporter des accessoires ?
Bernard
Justement. J’ai trouvé mieux.
Juliette
Ça ne m’étonne pas.
Alex
Comment ça, mieux ?
Bernard
On ne va pas rajouter des choses. On va en enlever.
Alex
Il n’y a rien sur la scène ! Tu veux aussi enlever le canapé ?
Bernard
Non, le canapé, on le garde. Il est parfait, il vous met en valeur.
Alex et Juliette regardent le canapé en mauvais état, perplexes.
Alex
Qu’est-ce que tu veux enlever, alors ?
Bernard, en faisant les cent pas.
Il faut déstabiliser le spectateur, le mettre dans une situation de malaise qui l’oblige à s’interroger sur lui-même et sur son couple.
Alex, bas, à Juliette.
Si tu dis « génial », je t’en colle une.
Juliette, bas, à Alex.
Je dis ce que je veux.
Alex, bas, à Juliette, en montrant Bernard.
C’est lui que tu as embrassé ?
Juliette, haut.
Génial !
Alex met une tape dans le dos de Juliette. Les deux recommencent leur lutte sous forme de pantomime burlesque, pendant que Bernard a le dos tourné.
Bernard, en se retournant.
Qu’est-ce que vous penseriez de jouer nus ?
Juliette va pour s’exclamer « Génial ! » mais s’arrête dans son mouvement, interloquée.
Alex
Nus ? Nus comment ?
Bernard
Comment ça, comment ? Tu veux un dessin ?
Alex
Tu veux dire sans vêtements ?
Juliette
C’est à peu près la définition de « nu », mon chéri.
Bernard
Imaginez un peu l’effet dans la salle. Ouverture de la pièce sur la scène du baiser sur le canapé. Le rideau s’ouvre, la lumière s’allume et vous êtes nus.
Alex, en prenant un air inspiré.
Ah oui…
Juliette, même air inspiré.
Oui, oui…
Bernard, enthousiaste.
Oui, hein ?
Alex, moins sûr de lui.
Oui, oui…
Juliette, idem.
Moui…
Bernard, essayant de soulever l’enthousiasme.
Oui ! On est d’accord !
Alex
C’est une bonne idée, mais…
Bernard
Une très bonne idée !
Alex
Oui, mais je me disais… Tu ne crois pas que ça risque de faire trop…
Bernard
Trop quoi ?
Alex
Trop… nu ?
Bernard se prend la tête dans les mains et fait quelques pas comme s’il réfléchissait intensément, avant de se planter devant Alex.
Bernard
Alex, qui est le metteur en scène ?
Alex
C’est toi, mais…
Bernard
Tu es comédien ?
Alex
Oui.
Bernard
Tu n’as pas peur de la nudité, quand même ?
Alex
Non…
Juliette, bas, à Alex, faisant un geste
équivoque en se moquant.
Alors, on a peur de montrer sa petite…
Bernard
La nudité est un costume de l’acteur !
Alex
Bien sûr… Bien sûr…
Juliette, bas, à Alex.
Sa toute petite…
Bernard
Mais si on y réfléchit, ce que tu dis n’est pas complètement idiot.
Alex, en regardant Juliette.
Ah !
Juliette hausse les épaules.
Bernard
Trop de nu… C’est pas faux…
Bernard reprend les cent pas en réfléchissant. Pendant qu’Alex parle, Juliette le regarde en faisant mine de jouer du pipeau.
Alex
C’est ce qu’il me semblait. On a vu beaucoup de comédiens nus au théâtre ces dernières années. Je ne voudrais pas qu’on t’accuse de tomber dans le cliché. Et puis, rassure-moi, on est bien en train de monter une pièce de boulevard, non ?
Bernard
Si…
Alex
Une pièce familiale pour un public qui vient se distraire, passer un bon moment ?
Bernard
Oui… Tu n’as pas tort… Trop de nu…
Alex
Je dis ça pour toi.
Bernard
J’ai une idée ! (Un temps. Juliette et Alex se rapprochent de Bernard, intéressés.) On va se limiter… au nu féminin.
Juliette
Hein ?
Alex
Ah oui ! Là, pourquoi pas ?
Bernard
On pourrait tenter le strip-tease en ouverture. Un choc dès le lever de rideau.
Juliette
Mais…
Alex, à Juliette.
Tu n’as pas peur de la nudité, tout de même ? C’est un costume du comédien.
Bernard
Ce sera troublant pour le spectateur. Il va se demander jusqu’où Juliette va aller.
Juliette
Oui, d’ailleurs, jusqu’où devra-t-elle aller, Juliette ?
Bernard ne répond pas, il est à nouveau perdu dans ses pensées.
Alex, bas, à Juliette.
Alors, on a peur de montrer sa cellulite ?
Juliette donne un coup à Alex qui rit.
Bernard, à Juliette.
Tu pourrais te placer là. (Il emmène Juliette devant le canapé, dos au spectateur, puis s’adresse à Alex.) Toi, tu t’assois dans le canapé. Voilà. Une scène froide. Pas de déhanchement, pas de musique. Un déshabillage simple, décidé. (À Juliette.) Tu pourrais commencer par enlever ton tee-shirt.
Juliette
Maintenant ?
Alex l’encourage du canapé avec un sourire triomphant.
Bernard
Mais oui ! On répète ou pas ?
Juliette
On ne pourrait pas s’en tenir au texte de ta pièce ?
Bernard
On s’en fiche du texte ! On est en train de la créer, cette pièce, là, ensemble ! On n’est pas à la Comédie-Française, on n’est pas prisonniers des mots de l’auteur ! D’ailleurs, c’est moi l’auteur ! C’est de l’art en mouvement ! Tu ne sens pas l’excitation de la création ?
Juliette
Je sens surtout que je vais me retrouver à poil…
Bernard
C’est ton personnage qui se déshabille, pas toi ! Allez, on n’est plus des enfants ! On y va, on répète. Enlève ton tee-shirt ! (Juliette obtempère de mauvaise grâce et se retrouve en soutien-gorge, dos au public.) Voilà. Première phase. Le public a le souffle coupé. Le rideau vient à peine de se lever, il n’a pas eu le temps d’entrer dans la pièce que, déjà, il a un corps qui se dénude sur le devant de la scène. Toute son attention est dirigée vers toi. Pour une fois, au début d’un spectacle, personne ne tousse, personne ne dit un dernier mot à son voisin, personne ne tripote son téléphone, tout le monde est captivé dès la première seconde. Le spectateur ne voit qu’un dos, il part déjà dans l’imaginaire, il plonge dans le fantasme.
Juliette
Grâce à mon dos ?
Bernard
Tu as un dos très expressif.
Juliette
On en apprend tous les jours.
Bernard
Ensuite, tu enlèves ta jupe tout doucement.
Juliette
Mon dos ne suffit pas ? Il est très expressif, pourtant. Regarde ! (Elle agite ses épaules, fait bouger ses omoplates.)
Bernard
Juliette… (Juliette souffle puis s’exécute de mauvaise grâce ; elle enlève sa jupe avec des gestes brusques.) Bon, la jupe, il faudra qu’on travaille un peu… Imagine ce qui se passera dans la tête des hommes à cet instant. (Il marche le long de la scène en regardant les spectateurs.) Ils sont tous là, assis dans un théâtre bien comme il faut. Certains y ont été traînés par leur femme, par des amis. Et tout à coup, ils ne regrettent plus. Ils se disent : « J’ai bien fait de venir, finalement, c’est pas mal le théâtre ! »
Juliette
Tu n’as pas peur que ça fasse un peu racoleur ?
Alex
Juliette n’a pas tort. Il ne faudrait pas qu’on t’accuse de chercher l’effet facile.
Bernard
Vous plaisantez ? Racoleur ? Facile ? Là, on est au cœur de la vie, les enfants, donc dans l’essence même du théâtre ! Là, on touche à une vraie émotion !
Juliette
Si tu veux savoir ce que moi je ressens, je…
Bernard, interrompt Juliette.
Maintenant, on passe au cran supérieur. Tu tiens le spectateur en haleine. Il est pleinement avec toi, captivé par ton geste. Et paf ! tu enlèves ton soutien-gorge !
Alex
Excuse-moi, Bernard… On n’est plus du tout dans le boulevard bon enfant, là.
Bernard
Exactement ! On investit le néo-boulevard, le vaudeville revisité. Comme quand la grande cuisine réinterprète les vieux plats populaires. D’où le soutif ! Allez, Juliette.
Juliette
Vraiment, Bernard, je ne le sens pas.
Bernard
Juliette, tu te rends compte à quel point le spectateur est suspendu à tes gestes à cet instant ? Tu joues dos au public, sans un mot, et tu atteins pourtant une intensité exceptionnelle. Les hommes dans la salle prennent un air inspiré. Ils évitent le regard de leur femme, juste à côté d’eux. Ils font semblant d’être concentrés, style « je suis au théâtre, rien ne m’atteint », « je suis dans un lieu culturel, je ne fais rien de mal ».
Alex
On pourrait discuter...